Pour sauver le régime local d’assurance maladie, changeons la constitution

par Jean-Marie Woehrling, président de l’Institut du Droit Local. 5 avril 2016.

regimelocal

Depuis plusieurs dizaines d’années un processus de transformation de la protection santé est en cours en France : une part croissante de cette protection passe du régime légal de la sécurité sociale à un système conventionnel par des assurances privées. Cette évolution menée aussi bien par les gouvernements de gauche que de droite n’a jamais fait l’objet d’un débat clair soumis à l’appréciation des citoyens. Aujourd’hui c’est moins de 50% des dépenses de santé qui sont remboursés par la sécurité sociale, le reste étant couvert par des assurances complémentaires.

Cette évolution n’a eu lieu que de manière beaucoup plus limitée en Alsace à cause de l’existence du régime local d’assurance maladie grâce auquel la sécurité sociale couvre une plus grande part des dépenses de santé.

La principale différence entre le système des complémentaires et le système de l’assurance maladie est que les cotisations des premières sont basées sur le risque que présentent les assurés, alors que celles des secondes sont basées sur leur revenus. Le facteur solidarité est plus grand dans ce dernier cas.

Avec la loi du 14 juin 2013, les assurances complémentaires santé sont généralisées pour les salariés et doivent être prises en charge au moins pour 50 % par les employeurs. Le régime local de sécurité sociale est quant à lui couvert à 100% par les salariés. La loi de 2013 n’a pas précisé selon quelles modalités ce régime local devait être adapté à ce nouveau contexte.

Faut-il généraliser le système du reste de la France à l’Alsace Moselle,  y étendre le principe d’une participation de 50% des employeurs, ou laisser le régime local en l’état ?

On constate d’abord que de telles questions ne peuvent être décidées par les Alsaciens et les Mosellans, ni directement ni par des instances représentatives. Il n’y même pas de procédure de consultation organisée.

On  apprend ensuite que même le Parlement national pourrait ne pas être compétent pour prendre des décisions développant un droit particulier à un territoire. Selon le rapport parlementaire établi sur cette question, la jurisprudence constitutionnelle ne permet pas que le Parlement puisse modifier le droit local. Il peut juste…. le supprimer ! Pour réformer le régime local d’assurance maladie, faut-il dès lors changer la Constitution.

Cet exemple nous montre une fois de plus les limites de la démocratie régionale en France. Pour renforcer celle-ci et pour donner un avenir au droit local, il faudra davantage que reconstituer la Région Alsace dissoute. Seule une nouvelle Région Alsace dotée d’un pouvoir  normatif permettrait d’adapter et d’enrichir le régime local. Sa pérennité passe par un changement constitutionnel en France, dans le sens d’une véritable régionalisation.

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