Sport

Le sport, un enjeu pour l’Alsace

Tribune de Jacques Schleef publiée dans les DNA du 8/12/2019. L’auteur est secrétaire général du CPA, et ancien membre du conseil d’éthique de la LAFA (Ligue d’Alsace de Football).

Allez Elsàss ! La création de la Collectivité européenne d’Alsace ouvre la possibilité d’une organisation territoriale nouvelle pour les fédérations sportives des deux départements du Rhin. Il faut saisir cette chance pour doter le sport alsacien de structures renforçant son autonomie administrative et budgétaire, mais aussi d’un cadre politique adapté aux relations avec les collectivités publiques. Facteur d’identité culturelle et de cohésion sociale, le sport -qui rassemble des dizaines de milliers de pratiquants et de dirigeants bénévoles- est à l’image de la diversité et de l’ouverture de l’Alsace.

En raison de notre histoire et de notre ambition particulières, il faut plaider pour la seule solution permettant de mettre en place une « stratégie sportive » globale. Toutes les évaluations ont montré le formidable gâchis financier et humain du modèle hypercentralisé mis en place ; les sportifs tout comme les salariés des ligues commencent à en subir les effets pervers (hausse du prix de licences, licenciements et mobilité géographique forcée).

Une réflexion sur l’architecture du mouvement sportif est donc nécessaire, car les spécificités de chaque discipline (individuelle ou en équipe) et de son « terrain » (village ou agglomération, club ou salle privée) ne sont pas prises en compte correctement ; la fusion des instances départementales en une entité unifiée et sa sortie du « carcan » du Grand Est imposé en 2015 est une nécessité démocratique. Il y a 5 ans, l’Etat n’a pas laissé le choix au mouvement sportif – aujourd’hui, il peut et doit être le précurseur d’une Alsace nouvelle !

La CeA devra accompagner cette volonté, notamment en lui accordant les aides que le Grand Est refusera aux « sécessionnistes »; dès maintenant, les deux départements pourraient mettre en place un Comité de dialogue avec toutes les branches du sport (du tennis au football, en passant par l’escrime et le basket) pour relever ce défi. Rien ne serait pire que la dispersion, avec certains sports restant divisés en deux fédérations départementales, d’autres limitant leur regroupement à la CeA en restant dans la région et d’autres reprenant leur liberté. Il n’existe pas de sport « alsacien » au sens de la « pelote basque », mais nous avons néanmoins (grâce à la coopération transfrontalière, par exemple), un potentiel de développement spécifique.  

Afin que le sport en Alsace soit vraiment  l’expression de cette passion commune, c’est ce courage qu’il faut avoir pour bâtir des institutions méritant le nom « d’Alsace »… 

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Football : déculottée pour la ligue Grand Est

Coup de tonnerre à la ligue de football du Grand Est, les représentants des clubs ont rejeté le budget 2019-2020. Avec 47 % contre, 32 % pour et 21 % d’abstention, la défaite est cuisante pour le président Albert Gemmrich. Un tel affront est un évènement rare et lourd d’enseignements.

Mais pourquoi les clubs ont-ils rejeté le budget proposé ? Les informations livrées par les DNA sont sidérantes. Rappelons que c’est Albert Gemmrich qui a organisé la liquidation des ligues d’Alsace, de Lorraine, et de Champagne-Ardenne au profit d’une ligue du Grand Est. Le football alsacien a ainsi été relégué du rang de ligue à celui d’un simple « district ». Tout cela s’est fait sur la promesse d’économies et d’efficacité.

Pour quel résultat ? On apprend maintenant que depuis la fusion, la nouvelle ligue a siphonné 400 000 euros de ses fonds propres. Et avec des recettes en berne et des dépenses difficilement compressibles (frais kilométriques, harmonisation des salaires), la situation ne va faire qu’empirer. Pour compenser les surcouts liés à la fusion des ligues, le budget prévoyait d’augmenter le prix des licences d’un euro pour toutes les catégories, ainsi que les droits de changement de club. A défaut d’économies, on taxe !

Les clubs qui ont sauté dans la fusion des ligues les deux pieds en avant s’en mordent maintenant les doigts. Pourtant, en 2016, Jacques Schleef (ancien membre du comité d’éthique de la ligue d’Alsace de football) et Dominique Lihrmann (président des éducateurs de football d’Alsace) avaient mené la fronde contre la fusion. Mais les présidents de clubs ont préféré suivre Albert Gemmrich. Il est vrai qu’avec ses fausses promesses, ce dernier n’a pas vraiment joué fair-play.

Nous avons une proposition très simple : reconstituer la Ligue d’Alsace de Football ! Cette ligue a très bien fonctionné pendant un siècle. Et pourquoi ne pas réfléchir à organiser des compétitions avec des clubs du Pays de Bade voisin ? Cela coutera sans doute moins cher en déplacement que d’aller dans l’Aube ou les Ardennes.

La démocratie sportive menacée

par Jacques SCHLEEF, membre du Conseil d’Ethique de la Ligue d’Alsace de Football, ancien entraîneur de football diplômé d’Etat, Secrétaire Général du Club Perspectives Alsaciennes. Article publié dans les DNA du 31 octobre 2015.

Avec la création de l’ACAL, ce n’est pas seulement le Conseil régional d’Alsace qui va disparaître, mais aussi de nombreuses autres institutions emblématiques de notre identité et qui permettaient aux Alsaciens de mener les politiques les plus adaptées à leurs besoins. Mais, au-delà des Chambres consulaires (Agriculture, Métiers, etc.) c’est maintenant un autre symbole de notre spécificité qui est menacé par un véritable « hold up » : ainsi que l’a annoncé Albert Gemmrich à Ribeauvillé samedi dernier, la LAFA (Ligue d’Alsace de football) doit être intégrée de force dans une future ligue du Grand Est. Oui, c’est un peu la liquidation générale de l’Alsace que nous aimons qui se prépare : « tout doit disparaître ! » semble être le slogan de tous ceux qui se sont ralliés à l’ACAL.

Beaucoup de questions restent en suspens, mais Albert Gemmrich semble prêt à suivre la ligne de Philippe Richert… Si ce « mauvais coup » réussit, c’est la vivisection de la Ligue au cours des prochains mois, avec la création de deux districts départementaux (Haut- et Bas-Rhin) et la remise en cause de l’organisation de nos compétitions de football qui, notamment dans nos villages et nos petites villes, sont indissociables de notre culture et de la vie associative locale.

Imagine-t-on demain de remplacer l’Appellation d’Origine Protégée Alsace par une AOP ACAL qui regrouperait le riesling avec le champagne et le gris de Toul ? Plus sérieusement, nos efforts en faveur de la coopération transfrontalière, qui sont notre contribution au projet européen, risquent fort, par exemple, d’être « sabotés » au profit de matches dans les Ardennes et la Haute-Marne…Les amateurs de ballon rond apprécieront cette logique de centralisation artificielle dans un espace que nous n’avons pas choisi.

Depuis plus de 90 ans, la LAFA est un exemple de structure gérée avec prudence et dynamisme par des bénévoles engagés. On veut la remplacer par un « monstre bureaucratique » sans âme et aux « ordres » de Paris.

Voilà ce que je refuse, et qui explique la pétition qu’avec quelques amis, nous avons mise en ligne afin de donner à Albert Gemmrich et aux dirigeants de la LAFA la légitimité nécessaire pour résister à « l’oukase » du ministère des Sports. On veut voler à l’Alsace son football : les footballeurs alsaciens ne se laisseront pas faire !