Le président Frédéric Bierry a annoncé, ou plutôt promis, la création d’un « Conseil de développement » de l’Alsace cet automne, une fois les élections départementales passées, après une consultation des citoyens prévue au cours de l’été. En matière de participation de la population à la décision, l’exemple de la plaque minéralogique incite à la prudence !
Sans préjudice de cette procédure, l’intention est louable, et tente d’anticiper les critiques:
– la parité des genres sera respectée, et tous les « territoires » seront représentés ;
– avec trois collèges le Conseil sera ouvert à la fois aux milieux d’affaires et aux organisations professionnelles, au monde associatif (sports et culture notamment) et aux pays voisins (Suisse et Allemagne) ;
– la coopération transfrontalière, dont la Collectivité européenne d’Alsace (CeA) est le « chef de file », sera une compétence obligatoire de la nouvelle instance, ce qui illustre la volonté d’intégration européenne de Frédéric Bierry.
Face au Grand Est, c’est donc autant un vecteur de communication qu’un outil de réflexion dont veut se doter la CeA, jusqu’ici peu « armée » en termes de prospective stratégique. Destiné à montrer la créativité de la CeA dans son cadre institutionnel (actuel), ce projet – s’il est validé – est néanmoins parsemé d’embûches:
– comme le CESER, le Conseil de développement risque de se heurter à l’indifférence des médias et de l’opinion (même si les fonctions seront gratuites, ses travaux généreront des coûts) ;
– au-delà des relations transrhénanes, ses compétences sont encore très floues et ne dépasseront pas le stade consultatif (faute de légitimité démocratique); le risque étant qu’il ne soit écoutée que s’il est d’accord !
– le choix de ses membres pourrait donner lieu à des polémiques, selon les critères retenus et le rôle du Conseil d’Alsace ou de son président (approbation du règlement intérieur par le Conseil et modalités de sélection).
Avec la création du Conseil de Développement, Frédéric Bierry souhaite élargir son assise populaire. Il peut aussi espérer que celles et ceux qui voudront siéger dans la future instance lui apporteront leur soutien.
S’il n’est pas question d’un « Sénat » ou d’une « Chambre civique », le Conseil de développement pourrait néanmoins s’imposer dans le paysage politique (en fonction notamment de la notoriété et de l’indépendance de son président/sa présidente) et de ses relations avec la presse. Pour cela :
– son fonctionnement devrait être transparent, et prévoir des auditions publiques délocalisées, au plus près des habitants (pour éviter toute « fracture numérique ») ;
– les questions d’identité et d’enseignement de la langue et de la culture régionales pourraient être un axe important de ses réflexions ;
– en tant que « laboratoire d’idées », le Conseil devrait également s’exprimer sur le fonctionnement de la CeA, ses missions et ses ressources, et sur les priorités de l’action publique.
Nul doute qu’il sera interrogé sur l’avenir de la CeA dans le Grand Est, et que sa réponse reflétera la volonté des Alsaciens. Le premier défi du Conseil : intéresser les jeunes, car l’Alsace n’aura pas d’avenir sans les Alsacien.ne.s de demain !
Le Club Perspectives Alsaciennes, 4/03/2021.