Torture des chiffres par le Grand Est : toujours et encore !

Selon les DNA du lundi 4 novembre 2019, la majorité régionale du Grand Est tiendrait sa revanche sur le rapport accablant de la Cour des Comptes qui pointait les surcouts liés à la fusion des régions. Dans quel sens ? « Car les « dépenses réelles de fonctionnement du Grand Est hors transport auraient baissé de 0,3% entre 2015 et 2018 ». C’est à partir de cette unique donnée tirée de l’IFRAP que Valérie Debord et Jean Rottner ont voulu  pour balayer les critiques.

 Voilà « la réalité des chiffres », s’est esclaffée la vice-présidente du Grand Est sur Twitter.

Par souci de précision, notons qu’il s’agit de la dépense réelle de fonctionnement par habitant, qui est passée de 293 euros en 2015 (avant fusion) à 292 euros en 2018, soit une baisse de 1 euro. On la trouve le tableau publié par l’IFRAP le 31 octobre 2019.

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A partir de ce seul chiffre, peut-on nier les surcouts de la fusion ?  Nous affirmons que non, pour les raisons suivantes :

  • La base de comparaison, entre l’année 2015 et l’année 2018, est fortement biaisée en ce qui concerne le Grand Est. En effet, la région Lorraine a été épinglée sévèrement pour de graves dérives des dépenses les années avant la fusion. Si elle avait été gérée correctement, la dépense aurait été plus faible en 2015 que les 293 euros qui servent de comparaison. La correction de ces dérives aurait dû amener à une baisse des dépenses. Le seul fait qu’elles stagnent est donc un mauvais résultat en soi.
  • Plutôt que de faire une comparaison sur une base biaisée, il vaut mieux comparer les dépenses entre les régions. Or, si on reprend le tableau de l’IFRAP, on constate que les dépenses de fonctionnement hors transport sont 263 euros en moyenne dans toutes les régions. Le Grand Est affiche, avec 292 euros, une dépense supérieure de 11% à la moyenne.
  • Pour évaluer la situation financière d’une collectivité, il ne faut pas se contenter d’un seul chiffre, mais d’un ensemble de données complémentaires pour avoir une vision claire. Si on prend les dépenses totales (incluant le transport), on constate une forte hausse des dépenses de fonctionnement. On voit bien qu’on ne peut pas se baser uniquement sur la dépense de fonctionnement pour juger de la situation, d’autant plus que cela ne dit rien sur l’utilité de la dépense.
  • Dans les dépenses de fonctionnement, il faut distinguer les dépenses d’intervention (services rendus à la population) et les charges à caractère général (couts de gestion de la collectivité). C’est au niveau des charges générales, qui constituent les « mauvaises dépenses », qu’on nous promettait des économies. Donc ce sont ces charges qu’il faut regarder en priorité. Le verdict est sans appel : ces charges sont en très forte hausse, comme le montre le graphique du rapport financier officiel de la région. On peut ajouter à cela les charges de personnel qui sont également en forte augmentation.

En conclusion, nous voyons que les élus de la majorité régionale persistent à nier l’évidence des surcouts causés par la fusion des régions guidés par leur seul souci de justifier leur politique néfaste pour les citoyens, qu’ils soient Alsaciens, Champardennais ou Lorrains. Utiliser un unique chiffre pour invalider les études indépendantes autrement plus sérieuses et rigoureuses est assez risible, surtout lorsque ce chiffre est construit sur une base biaisée. Nous comprenons bien que ces élus puissent avoir des intérêts particuliers à défendre difficilement compatibles avec la réalité des faits, et tentent de  les manipuler. Mais cette tentative de tromperie dépasse une nouvelle fois l’entendement.